• À la frontière siquare

    Lexica réarrangeait machinalement sa crinière verte en arborant une moue sceptique. Adossée nonchalamment au mur, elle scrutait tout le cynisme du tableau face à elle. Une baie vitrée donnait à voir les arabesques ténébreuses de l’espace de distorsion que traversait le vaisseau. Juste en-dessous, les yeux rivés sur le sol, le Sénateur semblait parti bien loin dans ses idées noires. À tel point que les remous de néant qu’elle observait par la fenêtre illustraient parfaitement la vision qu’elle avait de l’esprit du bonhomme.

    Depuis qu’elle le connaissait, elle savait qu’il n’était pas du genre à cueillir naïvement le jour. Ce n’était d’ailleurs pas plus mal pour quelqu’un avec autant de responsabilités entre les mains, pensait-elle. Elle ne l’avait cependant jamais vu concerné à ce point. La taille de ses cernes avait doublée et il passait ses journées à tourner en rond en faisant des circuits plus ou moins grands au sein de la corvette.

    Elle n’était pas du genre à se lier d’amitié avec ses employeurs. La moitié bionique de son corps témoignait que c’était rarement une bonne idée. Pourtant, elle éprouvait de la tendresse à l’égard de l’homme de pouvoir. Il ne fonctionnait pas de la même façon que tous les autres. Malgré tous les apports de sa personne à la société, malgré son statut et tous les privilèges que cela impliquait, il restait étonnamment humble et silencieux. Le fait qu’il ne se soucie de sa sécurité que dans des situations particulièrement critiques la perturbait également. Il était à des lieues de la paranoïa habituelle qui s’abattait sur les personnalités publiques. Tout dans le personnage lui donnait l’impression qu’il était ailleurs. Comme si son esprit ne parvenait pas à appréhender la réalité de l’Univers qui l’entourait.

    « Allez, patron, tenta-t-elle affectueusement, vous pensez pas qu’il serait temps de penser à autre chose ? D’vous amuser un peu, quoi. »

    L’intéressé ne répondit pas. Il se contenta d’un soupir abattu en passant ses paumes sur son visage.

    Lexica ne pouvait pas lui en vouloir de réagir ainsi. La décision du Consortium, de l’envoyer dans le cadrant Illustre 45 en longeant la frontière des Domaines Siquar était trop ambigüe pour ne rien cacher. Étant avant tout une mercenaire, elle n’accordait que peu d’intérêt à quelque politique que ce soit, mais son dernier job ayant duré bien plus longtemps que prévu, elle s’y était frotté par la force des choses. Finalement, cela faisait également partie de ses attributions, en tant que garde du corps, de se poser un minimum de questions.

    D’un côté, on l’éloignait de la zone de conflit avec l’Empire de la Palingénésie. Cela signifiait que le Consortium tenait à lui, publiquement en tout cas. De l’autre, la frontière siquare était un endroit peu contrôlé, ce qui en faisait le meilleur endroit pour voir s’évaporer une corvette diplomatique. Si quelqu’un au sein du Gouvernement voulait le voir disparaître, qui cela pouvait-il être, et pourquoi ?

    Si elle-même se posait déjà ce genre de questions, elle n’osait pas imaginer la guerre à laquelle devaient se livrer les pensées du Sénateur. Le genre d’angoisse à vous coller des insomnies de plusieurs semaines.

     

    Post-Scriptum

    Ces dernières semaines j'ai travaillé sur deux textes en particulier :

    D'un côté, le début de "Spectres", qui me trottait en tête depuis longtemps. Je ne sais pas s'il restera l'incipit dans la version définitive de l'histoire, mais pour le moment, il me semble être une introduction assez juste.

    J'ai une relation très particulière avec cette histoire parce que pour l'instant c'est celle qui se situe le plus avant sur la ligne temporelle de mon Univers principal. Même si je connais bien les raison de son existence, c'est-à-dire les choix successifs qui ont mené à la situation que j'expose dans le récit, je n'ai pas encore une idée très précise de la direction que je souhaite lui faire prendre. Un peu à l'image de l'Univers dans cette histoire, la trame est pour le moment hasardeuse et décousue, ce qui ne m'aide pas forcément à l'écrire. En revanche, la situation est pour moi propice à évoquer d'autres concepts et philosophies auxquels me font parfois réfléchir mes histoires lorsque je les conçois. C'est pour cette raison que je suis content de pouvoir l'avancer.

    De l'autre, je travaille sur le prologue de "The U-Niverse" et même si j'ai déjà réfléchi à un préquel (nommé Prexia, pour ceux que ça intéresserait) pour revenir sur des éléments évoqués au début de l'histoire, je peux affirmer qu'il s'agit ici d'un véritable début. En effet, même si je parle du début de Spectres plus haut, ça n'en reste pas moins la fin de toute l'épopée que j'ai déjà imaginée.

    Ici, la difficulté est toute autre, puisque j'ai déjà posé plus ou moins précisément le synopsis de huit des neuf ou dix saisons que j'envisage poursuivre dans cet univers. Il ne s'agit donc pas de partir à l'aveugle mais d'arriver à développer avec justesse une fiction que je repense régulièrement depuis 2014 et dans laquelle j'introduis parfois de nouveaux concepts qui viennent complexifier l'histoire.

    Si je parle de ces difficultés c'est bien pour répondre à la question que vous pourriez vous poser : Pourquoi ces textes sur lesquels je me suis investi ces dernières semaines ne sont pas ceux que je présente ici ?

    La réponse est simple : je ne les ai pas encore aboutis.

    L'un comme l'autre ont bien avancé et si je les découpais en petites parties comme je le fais ici j'aurais déjà de la matière à publier. Seulement, je ne suis pas encore pleinement satisfait et il est toujours possible que le début déjà en place vienne à changer un peu lorsque je peaufinerai la suite. Pour limiter les risques de devoir re-publier un texte trois fois, je préfère terminer au moins la scène décrite (entre 3 et 5 pages) avant de la découper en billets de blog.

    L'avantage, c'est que ça me fera matière à publier puisqu'une fois terminés ils m'offriront une à deux semaines de répit pour avancer d'autres projets d'écriture.

    En attendant, donc, j'ai décidé de poster cette semaine un texte que j'ai pondu hier en une demi-journée de travail. Il s'agit d'une nouvelle saga des Rêves Effondrés (même si c'est la suite de XenoGenesis, il est possible qu'en fonction de son évolution je supprime complètement la saison 1 pour faire de cette série la saga XG originale, raison pour laquelle je dis "nouvelle") dont l'intrigue me vient assez naturellement pour l'instant. Comme tous les Rêves Effondrés, les personnages principaux sont très librement inspirés de personnes que je connais et l'histoire a par moments conscience d'être fictive, mais je n'en expliquerai pas plus pour limiter les potentiels spoilers.

     

    Si tout ce que je raconte en Post-Scriptum a des allures de charabia, c'est normal. Je m'applique ici à parler de mes créations aussi intuitivement que possible. Ma bibliothèque de "projets en cours" étant particulièrement vaste, il me paraît tout à fait naturel qu'on s'y perde. Cependant, je me dis que pour ce qui souhaiteront devenir des lecteurs aguerris de mon imagination, tout ce que je dis ici fera un jour sens. Au même titre que tous ces schémas que je dessine pour relier mes mondes, personnages, objets, afin de garder les idées claires.

    Sur ce,

    Belle Lune


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  • [Ouvrir les yeux]

     

    Je suis allé chercher trop loin

    Un rêve qui ne me convenait pas

    La réalité sonne comme le glas

    Ce rêve n’est pas le mien

     

    Je suis allé chercher trop loin,

    Voulant bien faire les choses,

    Une ambition, un destin

    Qui me rendait morose.

     

    Je suis allé chercher trop loin

    Pour qu’ils ne s’inquiètent pas

    Une route pour demain

    Qui ne les décevrait pas.

     

    Je suis allé chercher trop loin

    Aujourd’hui, me voilà,

    Je me meurs de chagrin

    Et je force mes pas.

     

    Je suis allé chercher trop loin

    Un rêve qui ne me convenait pas

    J’ai voulu être un saint

    Pour ceux qui ne comprenaient pas

     

    Je me suis travesti

    J’ai couru au trépas

    Et me voilà, ici,

    Dépourvu de l’éclat

    Qui m’animait jadis

    Lorsque j’étais bien moi.


    Car maintenant, je le vois

    Cette voie salvatrice

    En vérité mortelle

    Elle m’a coupé les ailes

    Elle m’a jeté au feu

    Elle a brûlé mes yeux

    Et aveuglé mon cœur

     

    Et dans cette torpeur

    Je suis allé au bout

    A l’extrémité de la planche

     

    Je suis à genoux

    A tirer par la manche,

    Comme un enfant perdu,

    Un parent inconscient

    Car me voilà déçu,

    Essoufflé et mendiant

    Pour que l’on m’autorise

    A retirer ma mise

    Et pour que la fortune

    Ne fasse pas mainmise

    Et qu’au clair de lune

    Enfin, je m’harmonise.

     

    Je me suis réveillé

    Sur ce champ de bataille

    Et contre toute pensée

    Je n’étais pas de taille.

     

    Je me suis fait abattre

    A la première charge

    Désormais en surcharge

    Je ne veux plus me battre.

     

    J’aimerais tout quitter

    Je veux faire demi-tour

    Et pourtant, je me tais,

    Coincé, haut, dans ma tour.

     

    Je me tais car j’ai peur

    De n’être qu’une douleur

    Pour ceux qui m’ont soutenu

    Pour ceux qui y ont cru.

    Pour ceux qui voyaient l’or

    Qui penseront que j’ai tort.

     

    Pour ceux à qui je mens

    Encore pour un moment

    Sans vraiment savoir quand

    Ou par quel miracle

    Je retrouverai ce chant

    Loin d’une telle débâcle

     

    Un éden où l’effort

    Paiera quoi qu’il arrive

    Et où mes métaphores

    Ont vertu curative

     

    Une autre aire de guerre

    Mais où, à la même heure,

    Je ne serai pas derrière

    Et je vivrai sans heurts

     

    Et si certains, encore,

    Croient que je me déleste

    Ils ne peuvent qu’avoir tord

    Car cette voie céleste

    N’est en rien plus facile

    Que mon talon d’Achille

     

    Je la vaincrai, pourtant,

    Je suis plus que confiant,

    Dans cet endroit, je sais

    Que mes armes fonctionnent

    Et sans fragilité

    C’est ce qui me passionne.

     

    Teodore Wholf

    22 Juin 2018

    Post-Scriptum

    Je ne pense pas qu'il y ait beaucoup à dire sur ce texte que j'apprécie justement parce qu'il parle de lui-même. Si j'avais un commentaire à émettre il se baserait plus sur le temps qui s'est écoulé depuis que je l'ai écrit.

    Quand j'ai couché ces vers sur le papier, il s'agissait pour moi de renoncer à certains aspects de ma vie pour retrouver suffisamment de temps pour écrire mes histoires. Le choix fut complexe, angoissant, éreintant presque, mais mon constat était que l'écriture importait plus que quoi que ce soit d'autre. Constat d'une chose que je m'étais promis de ne jamais oublier et que j'avais pourtant laissé s'effacer de ma mémoire.

    Alors, si tout cela était si cher à mon cœur, comment se fait-il que l'écriture n'ait pas retrouvé sa place centrale dans ma vie ?

    J'ai comme l'impression qu'une fois qu'on laisse sa passion de côté, qu'une fois qu'on se laisse rattraper par d'autres fantasmes et d'autres addictions, il est difficile, sinon douloureux, de revenir sur ses pas pour retourner la chercher. Quelque chose qui avait naturellement germé en moi est devenu une source d'efforts. Retrouver cet état n'est pas une évidence. La passion est toujours là, mais le temps investi a fondu. Le reflex s'est mû en d'autres instincts. Fouiller internet à la recherche d'imaginaire plutôt que de le fournir du mien. Est-ce parce que c'est plus simple ? Peut-être que c'est simplement parce qu'on s'habitue. S'habituer à quelque chose c'est le pire ennemi de la créativité, non ? Je crois qu'il existe un dicton à ce propos, ou qui y ressemble.

    Moi qui rêvais de faire rêver avec comme seuls outils les mots, j'ai si peu lu et écrit ces derniers temps que mon vocabulaire s'éteint. Deux ans que je n'ai pas publié sur ce blog et, si ce n'est pas complètement une anomalie dans mon comportement, le fait que cela découle d'une productivité quasi-nulle est un problème.

    Dernièrement, au sortir de quelques discussions - parfois sérieuses et parfois de simples remarques impromptues - je me suis remis en question. Je souhaite plus que tout devenir auteur mais je n'ai jamais mené un projet à bien. Je me retrouve bloqué dans une sorte de bulle de quotidien morne où mes études me saoulent et où je passe mon temps libre à chercher des échappatoires à la réalité, toujours plus minables les unes que les autres. Je ne m'impose aucun rythme, aucun défi, et je n'écris quasiment pas. Si je devais jouer la carte du cliché, elle serait vite trouvée : ma vie manque de Passion. C'est un gros mot, avec une belle parure et autant d'interprétation qu'il existe de cerveaux différents.

    Là où le jeu est hypocrite, c'est qu'il existe des centaines, peut-être des milliers, de jeunes adultes dans la même situation que moi. Eux, n'ont aucune idée de ce qui les anime, de ce qui pourrait les motiver. Moi, je sais pertinemment ce qu'il me faut. Je ne vais simplement pas le chercher.

    Pourquoi ? Pourquoi quand je pense à l'écriture j'ai l'impression que je vais devoir fournir un effort, alors que quand j'écris cela m'apparaît si fluide et organique que plus rien autour ne semble exister ? Est-ce que mon cerveau est à ce point corrompu par le contenu facile d'accès que le simple fait de produire lui donne une image d'effort trompeuse ?

    Je ne sais pas s'il existe de vraies réponses à ces questions. Tout comme je n'ai aucune idée de pourquoi il est si difficile de se battre contre la procrastination. Ce que je sais, en revanche, c'est que si je ne me mets pas à faire des efforts, mon plus grand rêve restera à jamais une fiction. Ce n'est pas ce que je veux.

    Alors, même si cela va me demander du travail, de la régularité, et peut-être un investissement outre-mesure, j'ai l'intention de changer cette façon de vivre. Je ne crois pas qu'il y ait de sacrifice trop dur ou de prix trop élevé quand on parle de passion.

    Je vais donc, aujourd'hui, me poser un défi : écrire un à deux articles hebdomadaires pour ce blog. Au moins un texte de fiction ou un poème par semaine, c'est ma base de travail. Je ferai peut-être plus si j'ai envie de raconter ma vie, mais l'important pour moi c'est également d'avancer sur mes projets.

    Je suis un peu trop proactif pour ne me concentrer que sur un seul projet, une seule histoire et la faire naître d'une traite, alors poster des articles, des fragments d'histoires ou d'univers çà et là sera une bonne façon pour moi de combler mon envie de développer toutes mes créations en parallèle.

    J'essaierai de faire suivre les histoires longues sur plusieurs semaines car c'est aussi un moyen de développer une oeuvre complète, mais ce ne sera pas ma priorité. Puisque les histoires germent souvent sous forme de fragments désordonnés, de scènes emblématiques qu'on tisse ensuite les unes avec les autres, ce sont ces morceaux inopinés que je veux livrer ici.

    Certains, peut-être, seront frustrés de ne pas avoir de rendez-vous fixe avec une histoire définie, mais après des années d'écriture je sais que me contraindre à une régularité artificielle ne m'apporte jamais que des problèmes. Je veux effectivement avancer les textes que je considère essentiels à mon univers, mais je ne veux en aucun cas me forcer, sinon me rendre malade pour ça. C'est aussi la contrepartie de ma capacité à proposer des textes toutes les semaines car mon inspiration, elle, n'est pas constante. Il m'arrive de délaisser un monde pendant plusieurs semaines avant d'avoir de nouveau de quoi l'enrichir et ce serait un mensonge de ne présenter aux lecteurs qu'un contenu lisse et invariant.

    Voilà donc la première partie du programme que je nous réserve. Vous aurez tout le temps d'expérimenter les formes variées qu'il prendra.

    Sur ce,

    Belle Lune,


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  • Running Away est une histoire que j’ai commencée en début d’année pour lancer ma page Wattpad. La plateforme étant un réseau social où l’on trouve de tout, je ne savais pas vraiment à quoi m’attendre et je ne souhaitais pas entamer mes balbutiements là-bas avec une partie de mon histoire principale.

    Le blog étant inactif depuis un moment, je ne l’ai pas publiée ici en parallèle. Le fait est, cependant, que les options de mise en page et le confort de lecture sont beaucoup plus développés ici. Comme j’ai l’intention de reprendre les publications par ici, il me semblait également légitime de commencer par ce texte.

    Mon but est de rattraper l’avancement de l’histoire sur Wattpad, soit 4 articles en comptant celui-ci. Après cela, la suite sera publiée par articles dès que j’aurais suffisamment avancé. Comme je veux faire de ce blog la place centrale pour mes publications, les nouveaux articles seront d’abord mis en ligne ici puis, une semaine après, ajoutés à l’histoire Wattpad.

     

    L’origine de l’histoire est assez vague. J’avais cette scène avec le stylo plume dans la tête depuis plusieurs semaines. Malgré une partie des détails indéterminés, l’envie de l’écrire était assez forte. Je me suis demandé si en faire une scène d’introduction ne serait pas trop gênant vis-à-vis d’un public qui découvre le texte. Mais comme le scénario était très ouvert à ce moment-là, ce petit caprice pouvait aussi piquer la curiosité du lecteur et lui donner envie de rester pour connaître la suite.

    Quant à Alexandre, c’est un personnage que je traîne d’univers en univers depuis un peu moins d’un an, sans vraiment savoir lequel lui conviendrait. J’aimerais en faire un personnage marquant parce qu’elle me tient à cœur, mais en parallèle je ne veux pas lui offrir la place d’un personnage majeur dans mon univers principal.

    Je pense que le terme plus approprié soit que je cherche à en faire un personnage ‘‘épique’’, dont on se souvient, pas forcément un personnage fondamental.

    La difficulté est qu’il en va de même pour toute cette histoire. À l’origine, elle est censée être très secondaire, de celles que j’avance pour ne pas travailler en permanence sur le même projet au risque de devenir stérile. De la même façon que Homo homini lupus est – oui, j’ai vraiment commencé une histoire avec ce titre – je n’ai pas eu une inspiration consistante dès le début. Elle représente plutôt une somme de petits détails que j’ai trouvé intéressant d’ajouter ensembles. Le plus gros risque est donc de me retrouver avec un scénario bancal et plat parce que je n’ai pas su placer suffisamment d’intrigues majeures ou les faire interagir.

    Bien que de nombreuses idées soient venues renforcer les premiers concepts que j’avais alignés pour créer l’univers dans lequel elle se déroule, je ne considère toujours pas que son intrigue valle celles que j’ai développées dans mon univers principal. Ce sentiment personnel peut n’être pourtant dû qu’au fait que je n’ai pas encore apprivoisé les éléments qui composent ce décor.

    Je m’attends à beaucoup de travail pour, d’une part, enrichir au maximum l’univers et en faire un lieu intriguant sinon attrayant et, d’autre part, pour apprivoiser et épanouir au mieux les personnages.

    Un bon point en parallèle, c’est que la technique ne m’a pas posé trop de problèmes. J’ai réussi à écrire à un rythme fluide, sans me heurter à une grosse difficulté descriptive ou autre. J’espère que ce sera aussi agréable à lire que cela l’a été à écrire.

    Sur ce, Belle Lune,

    Et Bonne Lecture,

     

    Agir normalement (1/2)

     

    Jour 1 – 21h12

    ‘‘Je ne tiens pas à ce que l'on me comprenne.’’

    En plaçant un point vulgaire à la fin de sa phrase, du bout de sa plume incertaine, elle eut un haut-le-cœur. Un spasme révulsif lui amena l'estomac au bord des lèvres. Cet acte qu'elle perpétrait la dégoûtait.

    Alexandre maintint son stylo en argent au-dessus de sa feuille, immobile. Perdue dans ses pensées, elle ne semblait cependant pas réfléchir aux mots dont elle avait accouché en salissant la virginité de ce papier. C'était comme si l'effort n'avait eu aucune importance.
    Une goutte d'encre se détacha, appelée par la gravité, et s'écrasa sur l'un des ‘‘n’’ de son dernier mot. La jeune fille ne s'en préoccupa guère, elle cheminait bien au-delà, dans ses pensées.

    Une seconde goutte s'enfuit de ce stylo qui était décidément bien mal taillé, et vint se surimposer à la première.

    Sa main droite se leva péniblement et s'écrasa au milieu de la feuille sans prendre gare à l'encre qui devait désormais lui habiller la paume. Elle remarqua par la même occasion qu'elle était devenue gauchère, ce qui faisait certainement partie des potentiels effets secondaires qui lui avaient été annoncés.

    Elle serra intensément son stylo entre ses doigts, souleva son bras gauche avec la même tension que la chaîne qui remonte un wagon sur l'un des sommets d'une montagne-russe. Une fois assez haut, elle claqua de toutes ses forces son poing sur le dos de sa main droite, faisant sursauter le bureau en bois composite. Le bruit sourd parut hors du temps.

    Puis le silence revint. Ce silence, fausse preuve d'une quelconque quiétude dans la maison, n'eut jamais été aussi pesant qu'à cet instant. Au bout d'une ou deux longues minutes, ses yeux humides relarguèrent quelques larmes, timides mais lourdes. Elles furent accompagnées d'un couinement qui recelait plus de rage que de douleur.

    Ses phalange perdirent progressivement de leur constance, relâchant leur prise. Puis sa main gauche s'étala sur le dos dans un coin du bureau pendant qu'elle était secouée de spasmes de douleur. Elle hoquetait désormais des sanglots décousus. L'envie de vomir la tiraillait sans peine, mais cela ne suffisait pas pour lui faire décrocher le regard de sa réalisation. Le stylo argenté se dressait fièrement au centre de sa main, bordé par un afflux de sang qui faisait office de fontaine. Le liquide ferreux ruisselait finement sur les reliefs blanchâtres des tendons.

    Lorsque ses gémissements commencèrent à s’affirmer et que son flot de larmes fut plus dense elle entendit la voix intriguée de sa mère s’élever à travers la cage d’escalier jusqu’au premier étage :

    « Alex, ce bruit sourd, c’était toi ? »

    Alors les sanglots de la jeune fille s’arrêtèrent sur-le-champ. Elle serra les dents, encore mue par quelques soubresauts qu’elle maîtrisait avec difficulté. Elle se devait d’être convaincante, sans quoi la curiosité de sa mère l’emporterait sur son activité actuelle. Or, si elle montait, ce serait un contre-temps qu’elle n’avait pas anticipé. Alexandre se remémorait le moment où elle était remontée dans sa chambre et elle n’avait pas besoin de se tourner pour savoir que sa porte n’était pas verrouillée. Il valait peut-être mieux qu’elle ne le soit pas ; n’importe-quel comportement sortant de la normale mettait en danger sa décision.

    Elle inspira profondément, chercha au fond d’elle cette intonation de voix qui correspondait à un discours neutre. Et avec une parfaite maîtrise d’elle-même, sans laisser se glisser quelque indice sur sa situation, elle répondit :

    « Oui, maman. Je me suis cogné la main contre mon bureau, ça saigne un peu. Je suis en train de désinfecter. »

    La froideur qui régnait dans la pièce lorsqu’elle prononça ces mots eut dérangé quiconque assistant à la scène. Elle obtint seulement un « D’accord. » mitigé en guise de réponse, mais cela avait l’air suffisant pour la mettre hors de danger.

    Désormais consciente que son expérience lui faisait courir des risques bien inutiles, elle s’en voulut de ne pas avoir su attendre. Elle réanima sa main gauche et d’un geste qu’elle calcula afin de ne pas mouvoir son autre membre elle attrapa la manche de son pull qui gisait sur le dossier de sa chaise. Elle fit une torsade maladroite au tissu avant de le glisser dans sa bouche en refermant vivement sa mâchoire dessus.

    Pour ne pas trop y réfléchir, elle enchaîna aussitôt en empoignant de nouveau son stylo argenté. Elle avait l’intention de le retirer lors de la même seconde mais le simple fait de le saisir anima brièvement tous les nerfs de sa main droite. Un cri étouffé, grave et rauque lui racla le fond de la gorge. Elle voulu instantanément desserrer sa poigne, mais elle sut que si elle le faisait, elle ne reprendrait jamais sa plume en main.

    Elle bloqua sa respiration et arracha d’un coup sec le corps étranger. Un nouveau cri tamponné par le tissu lui échappa. Ses dents glissèrent les unes contre les autres malgré l’épaisseur de la laine. Le réflexe lui fit jeter le stylo, qui percuta le mur blanc devant elle et expulsa une gerbe de rouge et de jais mêlés sur le poster de son film favori. Elle fondit en larmes en se recroquevillant, le cadavre de sa main droite étendu sur son mot. Le retrait maladroit avait été plus douloureux que l’empalement. Désormais la plaie la brûlait.

    Lorsque l’averse se fut suffisamment calmée pour qu’elle puisse agit, elle ramena sa main droite à elle et de l’autre anima sa chaise à roulettes en poussant contre le bureau et cracha son pull-over. Une des roulettes butta contre un objet et arrêta le fauteuil, c’était sans-doute là où était retombé le stylo. Alexandre pivota à quatre-vingt-dix degrés sur sa droite, faisant alors face à sa petite salle d’eau privative. Elle se leva et marcha d’un pas mal assuré jusqu’au lavabo.

    Elle posa sur le rebord sa main gauche abondamment recouverte de sang car elle avait porté l’autre avec et laissa sa main droite se vider lentement dans le bac. Des larmes épineuses continuaient leur tracé anarchique sur ses joues. Et lorsque son regard se posa sur le reflet de son visage dévasté, elle se demanda comment elle ferait croire à sa famille que ce n’était qu’une égratignure.

    « Petite conne ! » feula-t-elle à son attention en frappant âprement le levier du mitigeur afin d’avoir de l’eau chaude. La gamine irréfléchie avait encore fait des siennes. Heureusement, ce n’était encore rien d’irréparable.


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  • La conversation la plus récente que j’ai pu avoir avec un membre de mon entourage à propos de ce blog évoquait le fait que, dans mes introductions, j’ai un peu tendance à survendre le texte qui suit.

    Il est vrai que sur certains articles, comme Aïkara ou Les Cinq à Athlenta, l’introduction est peut-être un peu trop développée par rapport au peu de contenu textuel.

    Je me dois donc de préciser que les paragraphes qui précèdent mes écrits ne sont pas simplement des préambules épurés en vue d’une présentation succincte.

    L’idée est de placer en quelques mots le texte, bien entendu, mais aussi d’expliciter les raisons pour lesquelles j’ai décidé de le partager sur ce blog. Je ne cherche pas à retranscrire exactement le texte comme le ferait un résumé ou une quatrième de couverture, parce que le texte court se trouve juste à la suite.

    L’introduction représenterait plutôt, en réalité, une sorte de réflexion générale. Elle me permet de faire part des pensées qui me sont venues pendant la conception du texte ou des grandes idées qui peuvent me traverser l’esprit, parfois, et qui m’ont inspirées pour l’écrire.

    Au risque de gâcher une partie de la surprise qui jaillit avec les premières phrases lorsqu’on découvre une situation, je m’autorise à installer une ambiance en harmonie avec le sujet. Peut-être que, si je réussis à vous faire poser certaines questions, le texte peut prendre une autre dimension.

    Déterrer un ancien texte dont moi-même je ne me souviens parfois que vaguement peut aussi être l’occasion de revenir sur le fait de sa création, et de sa recréation puisque j’essaie généralement de le retravailler.

    Enfin, le plus important pour moi, je souhaite relier ce texte au reste de mon univers, surtout lorsqu’il y a un lien direct, et c’est peut-être là-dessus que j’ai tendance à trop m’appesantir. Cet univers que je développe au fil de mes récits est, a priori, assez vaste. Chaque nouvelle histoire est susceptible de se dérouler dans un monde différent mais la plupart du temps je m’évertue à disséminer des références ou même des influences venant des autres mondes dans celui nouvellement créé. L’interconnexion n’entre pas en conflit avec le scénario de mon histoire principale, et je dirais même qu’elle y est nécessaire. En plus de fédérer toutes ces histoires qui n’ont pas toujours de lien évident en un corps qui fait écho à lui-même, elles donnent des raisons de se produire à certains événements et nourrissent le scénario. C’est également pour moi un jeu que d’essayer de joindre toutes les lignes spatio-temporelles en essayant de faire le moins d’erreurs possibles. Pour cette raison, je m’amuse à glisser dans mes textes d’introduction des références à des textes qui ont étés ou seront publiés. Certains se contenteront alors de répondre ‘‘O.K.’’ en prenant l’information pour ce qu’elle est. Mais dans le cas où quelqu’un se mettrait au défi, à mon plus grand plaisir, d’essayer de recoller les morceaux, ces introductions sont comme les indices d’un jeu de piste.

    Ce que je peux comprendre, c’est qu’à l’heure actuelle, le blog ne compte que peu d’articles et donc de textes. Ces échos, renvois et rappels restent assez flous et génériques. La seule chose que je puisse espérer est que vous vous y habituiez avec le temps, en découvrant les fameuses choses auxquelles je fais référence. Dans le meilleur des cas, au point de réagir à leur prochaine évocation.

     

    Soit dit en passant, cette publication signe effectivement mon envie de revenir poster mes écritures sur ce blog au moins une fois par mois.

    Malgré la possibilité d’une troisième année de classe préparatoire qui se pointe à l’horizon, je me motive à inclure dans l’organisation de mon planning des plages d’écriture qui faisaient défaut, et par la même occasion un peu de temps réservé à la publication.


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  • Elle arrive, bientôt là, nous y sommes presque... la semaine de partiels. Ah, la belle, elle m'évoque plus de peur qu'elle ne devrait, alors... pour la combattre comme je le peux, je me dessine une petite pause au milieu des révisions. Une pause écriture, bien entendu.

    Je trouve fascinant que ce soient les sentiments les plus durs, les plus tristes, qui nous font généralement écrire le plus. Oui, la tristesse ou la douleur sont souvent maîtresses de mes poèmes les plus inspirés.

    Ici, il s'agit d'un autre sentiment que je trouve un peu trop présent autour de moi en ce moment : la nostalgie. Pourtant, lorsqu'elles sont nées, les Cinq étaient plutôt une envie, un espoir, qu'une mélancolie. Mais je les ai associées à ce triste sentiment lorsque que j'ai commencé à écrire l'histoire. Elle voguait dans mon esprit depuis longtemps, et il m'a pourtant fallu attendre les vacances d'été précédant ma rentrée en seconde - en d'autres mots : il m'a fallu attendre de savoir que je ne reverrai plus mes amies - pour que je me décide enfin à la débuter.

    Enfin, je n'insisterai pas trop longtemps sur la dramatique car cela m'a également offert des sentiments très positifs lors que j'ai décidé de la reprendre et de l'avancer, il y a quelques semaines.

    C'est également pour cette raison que je nuance mon propos, et je pense que les plus beaux textes sont un mélange de nombreuses émotions réunies.

    Celui-ci est loin d'être parfait, mais encore trop jeune. Je n'ai pas eu le temps de le faire maturer, de le réécrire plus d'une fois, d'approfondir la syntaxe. Mais je me concentre sur l'histoire, que j'avais besoin de déterrer. Pour laquelle j'ai ressenti cette volonté de la continuer. Peut-être justement car elle évoque toutes ces choses de mon passé.

    Comme à mon habitude, je gage que ce n'est qu'une période. Il est à craindre que je n'aie le temps d'aller plus loin avant que l'inspiration s'évade, soufflé par la brise d'une autre histoire.

    Mais, en attendant, je consomme pleinement mes souvenirs de collège.

    Ah, et, une dernière petite précision... non, non, vous ne vous méprenez pas, la ville américaine s'écrit bien Atlanta... Mais, est-ce que nous avons parlé de ville américaine ?

    Sur ce, Belle Lune,

    Et Bonne Lecture,

     

    Tout est... relatif ?

                Je tends le bouquet de feuilles griffonnées juste sous le nez d’Abigail, porté par une certaine fierté.

                « Sais-tu ce que c’est que cela, chérie ?

                - Si tu me le faisais lire plutôt que manger, répondit-elle narquoise, je pourrais essayer…

                - Ce sont des notes ! Et prises avec ma propre écriture, sans quoi je dois l’avouer, cela n’aurait pas tant d’intérêt…

                - Ah, parce que ça a de l’intérêt ? » Shannon à l’air de se plaire à me défier, mais je pense qu’elle n’a pas plus idée de l’importance de ce papier que les autres.

                « En partant du principe que je ne suis jamais venu ici auparavant, je dirais que oui, ce n’est pas un élément à négliger. »

                La conversation reste en suspens pendant au moins une bonne minute. Abi s’empare des feuilles et commence à les lire. Mais les filles me regardent en attendant la suite. La seule qui ne parait pas bloquée parce ce que je viens de dire est Chloë. Elle a même l’air de ne pas du tout se soucier de la conversation. Elle se contente de faire le tour de la pièce en fouillant parmi les objets hétéroclites. Elle en étudie certains en détails, mais je n’arrive pas à savoir si elle cherche vraiment quelque chose ou bien si elle se contente d’explorer l’endroit à la recherche d’un quelconque trésor. Et finalement, elle se permet l’explication que je n’aurais pas à donner :

                « En gros, ce qu’il essaie de dire, c’est que ces feuilles viennent du futur. »

                Je claque des mains, enjoué de voir qu’au moins une de mes protégées commence à retenir les leçons… Enfin, je ne peux cependant m’empêcher de nuancer légèrement.

                « Oui, mais je dirais plutôt… passé, présent, futur… restons vague ; on passe nos journées au beau milieu d’un paradoxe, tout est relatif. » Je suis fier de voir que la petite blonde commence à s’intéresser à la relativité absolue, même si ce n’est qu’à l’échelle d’Athlenta pour l’instant… Mais mon côté critique ne peut s’empêcher de rappeler de ce que je pense de son alter ego dans ma réalité. « Et dire que tu gâches ton potentiel avec un CAP coiffure…

                - Et une poignée de connards trop âgés pour elle, ajoute Leslie avec un peu d’agressivité, on t’a entendu… »

                Elle a certainement raison de me remettre à ma place. Je suppose qu’il n’y a pas que Chloë qui a pu lire le texte salé que j’avais fait. Il semble y avoir une raison au fait qu’elles soient Cinq : unies comme les doigts de la main. Et actuellement, elles sont plutôt contre moi. Le plus gênant étant que je l’ai certainement mérité. J’essaie cependant de prendre les choses à la légère.

                « C’était un moment de faiblesse, que veux-tu ? Personne n’est parfait, je ne prétends pas l’être…

    - Oui, oui, la femme de ta vie c’est Abigail, répond sèchement la petite blonde, tu nous le répètes suffisamment à longueur de journées. »

    J’avoue avoir un peu de mal à déterminer si, comme à mon habitude, je me fais des films, ou bien si j’assiste bien à de la jalousie.

    « Je parlais du texte, en fait, tenté-je de me rattraper… Tu sais, si tu es disponible, moi je reste ouvert aux propositions. »

    Je constate alors que m’approcher d’elle doucement et faire glisser une de ses mèches blondes entre mes doigts n’est pas le meilleur moyen de me rattraper. Elle me regarde avec un sourire crispé, et j’ai soudain peur de finir stérile.

    - Artichaut ! » La remarque de Marine me paraît elle aussi justifiée. Je me suis foutu de sa vie amoureuse pour finir dans des situations pires que les siennes. Je commence à réaliser que j’ai vraiment été vache sur certains points. Je manque encore certainement cruellement de maturité puisque la seule chose que je parviens à répondre est que je me contente d’assumer le fait de les avoir toutes plus ou moins draguées.

    « Je crois que c’est ça qui me fait le plus pitié, lance Abi avec dégoût, que tu assumes. »

    Son regard n’est pas agressif, on dirait plutôt un blâme contrarié. Je m’en sentirais presque coupable, mais une petite voix au fond de moi me dit que cela ne changerait rien. Chloë se dresse sur la pointe de ses pieds et m’attrape par le col pour rapprocher ses lèvres de mon oreille.

    « Je croyais que tu défendais le fait qu’on ne soit pas nos alter ego. Mais bon, tu m’as laissé une chance… On en reparle quand tu seras un connard un peu plus âgé. »

    Elle me lâche et me dépasse en jonglant avec un objet quelconque, visiblement satisfaite. Du haut de mes quinze ans, de ce mètre quatre-vingt-dix, je n’en mène pas large face à cette petite blonde. Est-ce que je rêve ? Est-ce qu’elle se moque de moi ? Est-ce que je devrais m’inquiéter ?


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